Chapitre 1, Roman fantasy : Aurore et Crépuscule

Aurore et Crépuscule -Chapitre 1

Aurore et Crépuscule

 

Le jour, la magie de l’Aurore domine. La nuit, celle du Crépuscule est reine. Entre les Prêtres d’Aurore et les Magiciens de Crépuscule, un équilibre parfait règne.
Jusqu’à ce que naissent deux enfants : deux jumelles contraires. L’une servira le Soleil quand l’autre percera les mystères de la Lune. Deux enfants, deux magies… Mais une même règle : ne jamais faillir à son devoir de protection d’Alak’Vel.
Sylenn et Malünn sauront-elles vivre séparément et tenir leur rôle ?
Pourront-elles triompher de la terrible magie des Éclipses,
restées entre le jour et la nuit ?

 

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Chapitre 1 : Le puits d’Alak’Vel

 

Elle s’appelle Sylenn.

Elle a dix ans. Elle est fille du Soleil. Et, avant la fin du jour, elle deviendra Prêtresse d’Aurore. Telle est la destinée de la petite fille aux yeux d’ambre et aux cheveux de lumière qui se prépare pour la Cérémonie des Runes. Aujourd’hui, c’est pour elle que la magie d’Alak’Vel va s’éveiller.

Elmir passe et Sylenn se précipite pour entrer dans l’ombre de ses pas. Elle appelle :

— Maman ! Je serai bientôt une Prêtresse d’Aurore, moi aussi !

Elmir regarde sa fille d’un air grave. Elle repense au visage identique qui vit ailleurs, dans la nuit, et qui ne connaît pas son visage à elle. Elle voudrait aimer Sylenn d’un cœur entier, mais une part d’elle-même appartient à jamais à sa sœur. Et chaque fois, dans les yeux de Sylenn, elle revoit ceux de Malünn.

D’un geste tendre, elle caresse ses cheveux bouclés et chasse ainsi les souvenirs de son autre fille.

— Oui, Sylenn. C’est le jour où tu vas recevoir les Runes d’Alak’Vel. Tu es prête ?

— J’ai prié le Soleil pour recevoir les cinq Runes !

— Les cinq Runes ? Tu veux donc devenir une Aurore ? demande Elmir d’un air moqueur.

— Je veux que tu sois fière…

Sylenn vient de murmurer son plus profond désir d’enfant. Elmir, touchée, la serre contre elle et se sent coupable. Elle sait qu’elle aurait dû l’aimer, même sans sa jumelle.

— Je suis fière, Sylenn… Ne t’en fais pas ! Allez, va maintenant !

Sylenn s’éloigne de sa mère, mais elle sait que dans son regard l’ombre de sa sœur flamboie. C’est toujours la même ombre qui hante les visages qu’elle croise : personne ne la voit jamais sans se souvenir de sa jumelle…

Malünn, quelque part, sera toujours avec elle : à travers son absence, elle vivra constamment avec Sylenn. 

Les larmes montent dans le cœur de la petite fille qui souhaiterait ne pas être attachée au fantôme passé d’une autre. Qui aimerait exister, juste elle. Mais, obéissante, elle rejoint les Prêtresses d’Aurore qui doivent la préparer et sa jalousie s’efface à mesure qu’on lui met des rubans dans les cheveux. C’est sa mère qui sera fière de sa beauté. Les rubans dansent joliment dans ses boucles claires. Les rubans dansent comme des serpents de lumière. Sa mère les verra et elle verra Sylenn aujourd’hui, lorsqu’elle rencontrera le puits d’Alak’Vel.

Lorsqu’elle est prête, une femme à la chevelure blonde lui prend la main et la conduit dans les méandres du palais pour la rendre à sa mère. C’est Elmir qui lui donnera la Pierre de Soleil et la guidera jusqu’au puits. Seule une mère et sa fille peuvent se tenir côte à côte lors de la Cérémonie des Runes.

Sylenn retrouve Elmir avec assurance, sa belle robe d’or et d’azur imitant les royaumes du ciel. Sa mère lui sourit puis tend vers elle un écrin en bois incrusté d’or. Les lignes droites reproduisent les rayons du soleil comme si le contenu de la boîte en était le cœur. Sylenn s’approche, intimidée, et avec respect, soulève le couvercle : la Pierre de Soleil, alors, se révèle. Elle illumine le visage de la fillette comme jamais : sa peau et sa chevelure scintillent. Les yeux de Sylenn deviennent limpides. Son cœur s’agite, plus solide. La Pierre l’appelle. La Pierre chante. Pour elle. Sa chaleur, sa lumière, elle les lui offre. Elle se sent choisie. Elle se sent aimée. La Pierre est une merveille. Elle ressemble à un cœur fait de lumière. Elle bat d’un rythme silencieux qui charme Sylenn.

Lentement, Elmir saisit la gemme entre ses doigts fins et la dépose sur la poitrine de sa fille. Alors la Pierre pulse d’une aura nouvelle, plus chaleureuse, et s’incruste par magie sur le cœur de Sylenn. À présent, la Pierre de Soleil brille en écho du cœur de la petite fille.

Sylenn est prête pour rencontrer Alak’Vel.

 

~

 

Elle s’appelle Malünn.

Elle a dix ans. Elle est fille de la Lune. Et, avant la fin de la nuit, elle deviendra Magicienne de Crépuscule. Telle est la destinée de la petite fille aux yeux sélènes et aux cheveux d’acier qui avance vers le puits. Aujourd’hui, c’est pour elle que la magie d’Alak’Vel va s’éveiller. 

Malünn a gagné le droit de se présenter à lui. Elle a franchi la Montagne Sans Lendemain. Elle l’a gravie, seule, de ses mains d’enfant, de ses pieds de fille de la nuit. Elle le mérite. Arpenter les chemins sinueux au sein de la montagne n’a pas été facile et franchir son flanc est a été encore plus dur. Mais jamais elle n’a douté. Elle a le cœur taillé pour surmonter l’impossible : son cœur appartient à la Lune et aux Runes.

Même si le chemin lui avait pris cent fois plus d’heures, Malünn aurait vaincu la Montagne Sans Lendemain. À présent, face à elle, au sommet verdoyant de la montagne, se trouve le puits d’Alak’Vel. Sans âge, ses pierres sont couvertes de symboles magiques : ceux de la nuit et ceux du jour. Comme si une aura protectrice l’entourait, le puits repousse la mousse, l’herbe et les fleurs. Ainsi, un cercle s’est tracé autour du lieu sacré.

Quand Malünn rompt le silence immobile de la prairie d’un pas audacieux, elle sent battre le puits comme un cœur au milieu de la montagne. Alors, elle se souvient des légendes sur la course d’Alak’Vel. Depuis sa naissance, on lui raconte l’histoire du Dieu-Double Alak-Vel qui possédait d’incroyables pouvoirs liés au soleil et à la lune. Maintes fois, on lui a retracé sa course sans fin à travers les étoiles pour fuir le terrible Dieu-Chaos Alaos. Parce qu’Alak’Vel lui avait dérobé le cœur d’Aazül, Alaos le traqua depuis les confins de l’univers sans relâche, jusqu’à ce qu’à un tournant du Destin, Alaos brandit sa Hache d’Étoiles et frappa son frère d’une force innommable. Vaincu, Alak’Vel mourut en milliers d’éclats : les Runes. Aazül, dont le cœur appartenait toujours à Alak’Vel, rassembla les miettes du Dieu-Double et les plaça dans un puits, au sommet d’une montagne, au cœur d’une prairie qui ne devait jamais blanchir et qui serait le tombeau du frère d’Alaos. En dernier hommage, elle rendit le puits indestructible, rendant ainsi Alak’Vel éternel, même s’il restait éparpillé à jamais.

Les poussières du Dieu n’ont jamais disparu et ont fini par alimenter la terre d’Irinis de sa magie. C’est ainsi que le jour et la nuit, jumeaux contraires, se succédèrent et se pourchassèrent sans cesse pour imiter la fuite d’Alak’Vel à travers les étoiles et les âges.

Malünn, le regard déterminé et luisant d’acier, saisit alors la Pierre de Lune dans son sac. La gemme tient à peine dans sa main d’enfant et scintille doucement d’une faible aura blanche. La lumière de la Pierre est claire et apaisante. Elle chante. Elle luit. Elle est comme un sourire. On dirait qu’elle est douce comme cœur. Elle bat. Malünn la plaque contre son propre cœur. Le minéral s’emboîte par magie. La Pierre rit et éclate d’une aura nouvelle : plus obscure.

Avec la Pierre qui fait écho à son cœur, Malünn s’avance vers le puits.

 

~

 

Au début du jour, Sylenn a commencé l’ascension de la Montagne Sans Lendemain. Elle a emprunté l’escalier dérobé qui serpente le flanc ouest, et, durant des heures, harassée par la chaleur du soleil et par la progression difficile, elle a monté les cinq cents marches la conduisant jusqu’à la prairie et au puits. Ses pas guidés par la Pierre qui résonnait de plus en plus fort à chaque marche, la fillette a suivi les traces laissées par tous les Prêtres d’Aurore avant elle et atteint enfin le sommet en milieu d’après-midi. Épuisée, elle s’étend sur l’herbe anormalement verdoyante de la prairie et reprend haleine. Sa mère s’assoit près d’elle et le temps passe au-dessus d’elles tandis que le puits attend Sylenn. Finalement, Elmir souffle à sa fille :

— Il est temps, Sylenn. La fin du jour arrive, tu dois y aller.

La fillette se redresse et se dirige vers le puits sans un mot. Elle sait que sa mère est juste derrière elle. Elle n’est pas seule. Pourtant, Sylenn, soudain, a peur. Elle doute et appréhende la rencontre avec le puits. Elle connaît les légendes de la course sans fin d’Alak’Vel et de sa mort en milliers de Runes. Elle sait sa puissance. Elle sait que le Dieu-Double vit encore dans le puits sous une forme éparse. Elle craint de le rencontrer.

Mais Sylenn ne peut reculer. Tandis qu’elle avance, elle entend la respiration faible de la nature qui meurt un peu plus, étouffée, sous ses pieds qui la mènent jusqu’à Alak’Vel.

Alors, le puits et ses symboles d’or et de lune flamboient. Ils répondent à l’appel de la Pierre. Ceux de lumière s’agitent davantage, ils savent que c’est une Pierre de Soleil qui approche. Plus un bruit n’existe en dehors du murmure de la magie de la gemme et de celle d’Alak’Vel lorsqu’elle pose sa main sur le puits. Elle épouse la pierre froide qui sert de tombe aux morceaux éclatés d’Alak’Vel et sent une magie glaciale à l’intérieur de l’abysse sans fond.

Dans l’œil du puits, il n’y a que le vide. Elle ne voit aucune eau, aucune magie. Mais elle entend. Elle entend comme un écho. Une petite vibration qui remonte depuis la gorge du puits. C’est une petite chanson. Un râle qui s’échappe. Qui s’engouffre en elle et qui décrit des courbes. Et à mesure que le son se répète, les courbes deviennent des mots…

« Tu t’appelles Sylenn… Fille d’Elmir. »

La fillette se met à trembler. Le puits lui parle. Sa mère l’avait prévenue, mais la voix irréelle et vibrante de magie du puits la terrifie. C’est Alak’Vel. Et il sait. Il sait tout d’elle.

 

~

 

Quand le puits se met à lui parler, Malünn frémit. La puissance qui résonne à travers la voix gutturale échappée du puits et des restes de la magie d’Alak’Vel est effrayante. Mais Malünn serre les poings et calme son cœur. Elle a assez de courage pour faire face au Dieu-Double lui-même. Elle crie au puits :

— Oui, je suis Malünn ! Et je viens quérir les Runes qui me reviennent !

Le puits se tait un instant, puis dans un vent plus aigu, une nouvelle parole est prononcée depuis le fond sans âge des pierres.

« Tu es une jumelle… Une jumelle contraire, Malünn… Ton destin sera maudit ! »

            Malünn n’arrive pas à croire ce que révèle Alak’Vel. On ne lui a jamais parlé d’une jumelle… On ne lui a jamais dit qu’elle avait une jumelle contraire… Lui aurait-on menti ? Pourquoi le lui cacher ?

            Et la petite fille se souvient des histoires que racontent les Lunaires sur les jumeaux contraires, l’un fils du soleil et l’autre de la lune. On dit que leur destin est lié. Et que la mort les attend toujours au bout du chemin. Que séparés, ils ne peuvent vivre…

Malünn ne veut pas y croire. Alak’Vel lit en elle et fait virevolter ses dernières paroles :

« Fille de la lune, tu partages tes Runes avec ta moitié de l’autre côté. Ta magie sera le miroir de la sienne… Alors plonge ta main, Malünn, et deviens Magicienne de Crépuscule, Porteuse de Runes ! »

Le puits ordonne et Malünn s’exécute.

 

~

 

Sylenn plonge son bras dans le puits : un liquide lumineux apparaît, appelé par la Pierre de Soleil. Elle sent le contact de la magie du Dieu. C’est comme une brûlure contre sa peau ; et des symboles se tatouent sur sa chair. Elle serre les dents et voudrait hurler sous la douleur mais elle se souvient de sa mère, près d’elle. Sylenn ne veut pas qu’elle l’entende crier. Elle veut être plus forte. Alors, elle reste muette tandis que la magie d’Alak’Vel écrit sur sa peau les marques de sa puissance.

Quand le puits s’éteint, Sylenn retire son bras : un cercle de Runes est gravé autour de son poigné en lettres de feu.

 

~

 

La magie heurte Malünn de plein fouet : elle enlace son bras et l’enserre comme le corps d’un serpent. Elle ne peut plus se libérer. La Pierre de Lune murmure et la magie du puits lui répond.

Quand le puits s’éteint, Malünn retire son bras : quatre cercles de Runes sont gravés sur sa peau en lettres d’ivoire.

 

 Texte protégé : Copyright 2018

 

Qu’en pensez-vous ?

 

J’ai envoyé ce chapitre avec prologue au concours de la nouvelle plateforme de lecture et d’écriture : Kawabook. Je la trouve très prometteuse et j’espère donc que mon début de roman saura séduire le jury. J’attends vos avis pour me faire une idée sur la qualité de ce début ! Merci d’avance !

 

Runes + Titre = Parfait !
Couverture réalisée par la talentueuse et adorable Doloreshell, que je remercie du fond du coeur pour cette représentation fidèle de mon Univers ! ❤

9 réflexions au sujet de “Aurore et Crépuscule -Chapitre 1”

  1. Je serai peut-être d’autant plus objective que ce n’est pas mon genre préféré. Mais ton récit séduit par son mélange de force et de fluidité. ( Une coquille : « poignet  » dans la phrase « Quand le puits s’éteint … » , tout à la fin du chapitre.) Pas un mot de trop, de l’élégance, Mélodie 🙂

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    1. Je te remercie pour ce commentaire objectif et élogieux ! Je suis heureuse que mon style te semble élégant et juste, fort et fluide ❤ Autant de qualités et de caractères que je souhaite mélanger dans mes écrits ! (merci aussi pour la coquille ! je l'ai corrigée)

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  2. J’ai adoré la couverture pour ton futur livre aurore et crépuscule, elle est trop magnifique et l’histoire est vraiment prometteuse. Il faut absolument le finir j’ai trop hâte de le voir en livre finit et de pouvoir le lire. Ta plus proche fan.

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